Mon POV sur le nucléaire (1)

Petit préambule à ce billet. Il ne traite pas directement du contenu de Wikipédia, mais sa rédaction est finalement la conséquence de ce que j’ai pu faire sur Wikipédia. Dans mon esprit il doit être suivi d’un second billet qui évoquera le traitement de ce sujet (le nucléaire) dans les articles de fr.wikipedia. Il ne me parait donc pas illogique de mettre ce billet dans le flux de billets en lien avec Wikipédia.

Ce n’est vraiment pas facile pour moi d’émettre un point de vue radical sur le sujet : totalement anti ou totalement pro ? Je crois que je suis ni l’un ni l’autre. Je me sens tiraillé entre différentes probématiques environnementales et énergétiques.

L’énergie nucléaire génère des déchets radioactifs à vie longue. Quels cadeaux faisons-nous aux générations futures en enterrant ça dans leurs futurs jardins. J’ai beaucoup aimé la comparaison qu’une amie m’a faite l’autre jour. Elle disait : que dirions-nous si nous devions passer notre temps à nettoyer les poubelles de l’homme de Cro-Magnon ? Remarque pleine de bon sens. Toujours dans la même idée, j’ai récemment lu Homo Disparitus d’Alan Weisman. Sur la base d’études scientifiques ce journaliste décrit comment la Terre vivrait la disparition de l’Homme, en postulant une disparition nette du jour au lendemain. Il parle du retour de la végétation dans des zones sur-urbanisées comme New-York, de la survie des écosystèmes totalement créés par l’homme. Il évoque aussi la problématique du nucléaire sans aucun contrôle ni surveillance. Je vous conseille vivement cette lecture pour la totalité du livre, pas que pour le chapitre sur le nucléaire. Ca fait relativement froid dans le dos. Donc oui comme de très nombreuses personnes j’ai de grosses craintes quant à la radioactivité et ses conséquences dans le futur à long terme.

Vous me direz probablement que cela fait de moi un antinucléaire convaincu. En fait pas complètement, j’ai une formation professionnelle dans le domaine de l’énergétique. Ainsi, à sortons du nucléaire, la première chose qui me vient à l’esprit c’est On fait comment sans ? Les kWh électriques produits par le nucléaire ce sont des kWh que nous demandons tous en allumant la lumière, en mettant la machine à laver le linge en route, en geekant sur notre PC, en prenant le train, etc.

Peut-on se passer du nucléaire et maintenir notre niveau actuel de consommation d’électricité ? La réponse est clairement négative. On ne peut pas produire le niveau actuel d’électricité en fermant totalement les centrales nucléaires. La solution passe par une intense réduction de la consommation : rationalisation des besoins, optimisation énergétique … Ce processus appliqué à tous les foyers, toutes les industries et tous les services d’un pays prend quand même du temps. Simultanément il faut développer les énergies renouvelables : l’éolien, le solaire photovoltaïque… De la sorte, on pourra petit à petit fermer des tranches nucléaires. Mais vouloir le faire instantanément, c’est assurément mettre en service des centrales thermiques classiques (combustion de charbon, de fioul ou de gaz) avec les problèmes environnementaux que cela induit (gaz à effet de serre, réchauffement climatique).

J’entends certaines personnes me dire que des pays font sans le nucléaire, petit tour d’horizon européen :

  • l’Italie. La production nationale est basée sur le thermique. Elle est aujourd’hui ultra dépendante des importations d’électricité notamment de France et de Suisse ;
  • la Norvège. La production nationale est quasi intégralement assurée par l’hydraulique : 3 pelés et 2 tondus sur un immense territoire montagneux avec un climat océanique (précipitations importantes). Cette situation n’est hélas pas transposable partout.
  • l’Autriche. Environ 1/3 de thermique, 2/3 d’hydro. Là aussi le relief particulier (Alpes) joue un rôle important, mais n’est pas suffisant.

Chaque situation nationale est particulière. Un pays comme l’Allemagne a fait le choix de sortir du nucléaire. Des tranches nucléaires ont été arrêtées, aujourd’hui deux tiers de l’électricité y est produite par combustion de combustibles fossiles. Là où l’Allemagne est vraiment sur la bonne voie, c’est en termes de réduction de la consommation d’électricité. Depuis deux ans, la consommation globale d’électricité du pays diminue, alors que ce n’est pas le cas chez les voisins (-2 % en 2006, -2.3 % en 2007, ). Les années précédentes cette consommation augmentait, mais déjà à un degré moindre que la France, la Suisse ou la moyenne de l’Europe des 15.

Pour en revenir à mon point de vue, nous avons aujourd’hui l’héritage de décisions prises par nos parents (au sens large). Ces décisions ont été de vivre dans une société d’abondance et d’opulence totale. Mes parents sont nés, leurs parents lavaient le linge dans un lavoir à 500 mètres de la maison, n’avaient pas de frigidaire. Cette génération a vécu une transition au cours de laquelle on est passé d’une société en rationnement à une société quasi no-limit. Rationaliser l’énergie est resté pendant bien longtemps un concept dénué de sens. Pour le nucléaire, c’est aussi à cette époque que ce choix à été fait.

Comme je l’ai dit au début de ce billet, le nucléaire offre trop de risques et de cadeaux empoisonnés pour se satisfaire de cette solution. Vivre sans est un objectif à ateindre. Mais l’état actuel de notre société de consommation fait que cette sortie du nucléaire se fera progressivement et notamment par un changement radical de notre façon de vivre. C’est donc tant aux pouvoirs publics, qu’aux fournisseurs d’électricité qu’à nous, consommateurs, de prendre les choses en mains. Le fournisseur d’électricité est là pour faire du chiffre d’affaire, donc vendre du kWh électrique, pas pour demander de réduire la consommation. C’est une réalité économique qui va dans le mauvais sens, hélas. Mais le consommateur a aussi sa part de responsabilité. C’est bien joli de se présenter comme anti-nucléaire, mais si à coté on se déplace tout le temps en train sans modération, si la télé est allumé dans la pièce d’à coté pendant qu’on cuisine … (la liste est trop longue).

Alors oui pour être contre une utilisation de l’énergie nucléaire, mais ça commence d’abord par se responsabiliser sur l’énergie que nous utilisons. Il ne faut pas attendre que les industriels changent tous les réacteurs nucléaires par des panneaux solaires, pour le même confort personnel. C’est techniquement irréaliste, une utopie.

Voilà, pour mon point de vue. J’assume totalement avoir utilisé de l’électricité pour rédiger ce post. À cette époque-ci de l’année son origine est d’environ 2/3 d’hydroélectricité et 1/3 de nucléaire (je vis en Suisse). Mais vous aussi en lisant ce post vous aurez, pour la plupart, utilisé de l’électricité d’origine nucléaire.

Voili, voilà. D’ici peu un billet sur le traitement du sujet sur Wikipédia. Ceci dit vous pouvez réagir dès maintenant à ce billet.

Ludo

47 commentaires

  1. Je suis plutôt d’accord, mais :

    *l’éolien en milieu rural c’est vraiment hyper-moche (faites comme dans To aru majutsu no index, mettez les au sommet des gratte-ciels !)

    *La production de panneaux photovoltaïques utilise des matériaux rares qui auront disparus de la surface de la planète d’ici 15 ans au train ou vont les choses (enfin t’en sais surement plus que moi sur le sujet)

    Donc reste l’hydraulique et dans une moindre mesure la maréemotrice comme solution réellement viable+propres(independamment de la destruction de faune pour construire le barrage)

    • Pour la même quantité d’électricité une ferme éolienne prend environ 80 fois plus de place qu’une centrale nucléaire. Si tu trouves ça moche, il va falloir t’habituer.

      Le solaire photovoltaïque est effectivement problématique à ce niveau là. Ca montre bien qu’aucune solution n’est parfaite.

      L’hydraulique dans un pays comme la Suisse est quasi saturé, en France je crois qu’on en est pas loin. L’Autriche a encore un peu de potentiel, mais c’est limité. Globalement l’hydraulique n’a plus beaucoup de potentiel.

  2. Il ne me semble pas que les gens aient pris quelque décision que ce soit. En ce qui concerne la France tout au moins, ce sont les technocrates qui sont responsables de la nucléarisation de la France (à un niveau unique au monde).

    • Je me suis mal exprimé dans cette phrase. Oui la décision est venue d’en haut. Ceci dit, en début de paragraphe j’ai dit : décisions prises par nos parents (au sens large). Au sens large signifiant pluôt : la génération de nos parents.

  3. Ca me semble un bon résumé pragmatique: personne n’aime le nucléaire en soit (à part un de mes amis physicien nucléaire pour qui c’est « un cadeau des dieux », mais il joue un peu l’extrêmiste en réaction aux extrêmistes anti-nucléaires..), personne ne le regretterait, mais pour l’instant on doit faire avec. Les gens ne sont pas prêts à baisser leur consommation drastiquement, et les énergies alternatives ne sont pas prêtes à remplacer le nucléaire à grande échelle –> équation insoluble.

  4. Une autre source possible, c’est la fusion nucléaire, qui évite pas mal de problèmes de la fission.

    L’argument du mode de vie décidé par nos parents est très bon (je crois que mes parents ne comprennent pas vraiment pourquoi ne n’ai pas de voiture), mais il ne doit pas non occulter que rêver une « décroissance » de la consommation, c’est rêver d’un niveau de vie stagnant dans les pays en développement.

    Je pense qu’il faut affronter en face le fait que l’on va consommer de plus en plus d’énergie. Et si une voiture à essence, polluante, avec un rendement de 15% (soyons généreux) est remplacée par 20 voitures électriques propres qui permettent à des gosses d’un pays en développement d’aller à l’école ou à l’hôpital, eh bien soit.

    La consommation d’énergie n’est pas forcément un mal en soit, il faut juste la consommer et la produire intelligemment.

  5. Il ne faut pas oublier un truc : si nos parents (ou grands-parents) ont autant misé sur le nucléaire, malgré tous les inconvénients de la technologie, c’est qu’ils n’avaient pas trop le choix (sauf celui de continuer à vivre sans électricité, mais ce n’était pas vraiment un choix).

    Actuellement, les avancées techniques commencent à nous donner les moyens de ce choix, même si c’est encore très flou. Si tout va bien, ceux qui viendront après l’auront, eux, ce choix.

    (Oui, je sais qu’il est d’usage de vaticiner sur nos enfants qui seront tous pauvres et n’auront rien à bouffer parce qu’on a pris tout le pétrole, mais je pars du principe que ce n’est pas un argumentaire cohérent.)

    Sinon, je suis content que personne n’ait encore tenté de l’idéologie de la décroissance, forcément nécessaire, dans la discussion.

    • Hmmm, je ne sais pas trop; ils auraient très bien pu y aller comme des gros crads avec du pétrole et du charbon. Le choix de miser autant sur l’industrie nucléaire remonte à De Gaulle, et la filière « uranium naturel-graphite » dénote une certaine préoccupation de produire du combustible militaire (c’est la même filière qu’à Tchernobyl, choisie là-bas pour les mêmes raisons). Je pense que le choix était à l’époque surtout un choix typiquement gaullien d’une farouche indépendance, tant sur le plan de l’approvisionnement en carburant que sur le plan d’une industrie de l’armement nucléaire.

      C’est sous Pompidou qu’on est passés à la filière à uranium enrichi et eau pressurisée actuellement utilisée.

      Mais bon, je ne suis pas historien du domaine.

  6. Un autre point, c’est de voir de quoi procède l’attitude anti-nucléaire extrémiste.

    Il y a une part de soucis environnemental doublé d’ignorance, de type « pas d’ADN dans mes tomates ! ». Il y a ceux qui n’ont pas les moyens intellectuels de comprendre et qui en conçoivent une peur viscérale, et ceux qui, confrontés à quelque chose qu’ils ne comprennent pas, préfèrent rejeter la nouveauté que de se prendre en main et apprendre. Les imbéciles ont toujours brûlé les sorcières, rien de nouveau sous le soleil.

    Mais il y a une autre composante à l’anti-nucléarisme jusqu’au-boutiste : c’est la composante purement politique. Elle est entièrement basée sur une certaine conception de la société, et est totalement déconnectée de toute considération écologique. C’est une mentalité qui ressemble un peu à l’anarchisme populiste, et se méfie a priori de tout ce qui évoque l’autorité — au sens scientifique ou policier.

    Il faut lire « Pour repolitiser l’écologie » pour comprendre l’étendue du désastre ( http://www.dossiersdunet.com/spip.php?article1046 est assez représentatif ). c’est une collection assez disparate de billets écrits par des groupes d’extrème-gauche et des groupes « écologistes » durs, et qui tournent d’assez loin autour de la question de l’environnement — par exemple, il y a quelqu’un qui réclame une loi interdisant aux constructeurs de voitures de construire des faces avant que les enfants pourraient confondre avec des visages. Soit dit en passant, (si je me souviens bien, je confirme dès que je retrouve le bouquin), il y a dedans un billet écrit par la CRIIRAD, ce qui en dit long sur l’indépendance et l’impartialité de cette prétendue commission.

    La raison pour laquelle les « écologistes politiques » détestent l’industrie électro-nucléaire, c’est qu’elle est au mains de grosses organisations, qu’elle fonctionne à partir de grandes centrales plutôt que de façon décentralisée, qu’elle est liée au capitalisme, etc. La complaisance avec laquelle des incidents violents sont rapportés procède de la même logique : montrer l’industrie nucléaire comme une « force d’oppression » ; et a contrario, eux multiplient les appels à la « démocratie » et autres machins « citoyens ».
    Du point de vue de l’ingénieur en environnement, le point crucial est que les anti-nucléaires durs détestent le secteur électro-nucléaire indépendamment de toute considérations de risque ou de pollution : ils continueraient de le détester quand bien même le secteur serait entièrement sûr et sans déchets. C’est pourquoi ils haïssent particulièrement ITER, qui risque de donner naissance aux pires des centrales nucléaires : celle qui n’ont pas de défauts.

    Les faiblesses de l’industrie nucléaire sont vitales pour l’anti-nucléarisme politique : elles sont les hochets qu’on agite devant le public inquiet de l’environnement pour le faire marcher derrière une bannière qui n’a en fait rien à voir avec l’écologie ; sans défauts dans le cycle nucléaire, plus de militants — enfin, plus qu’une poignée d’anarchistes excentriques qui apparaîtraient pour ce qu’ils sont.

    Si l’on prend l’exemple concret de Stéphane Lhomme (qui a écrit un truc dans « Pour repolitiser l’écologie »), on voit qu’il a commencé sa carrière politique dans le trotskysme avant de s’intéresser à l’anti-nucléarisme, que son autre dada est sa haine de Juppé, qu’il adore se confronter à la police au point de provoquer lui-même des incidents. Dans son cas, se présenter en victime d’un régime autoritaire n’est pas une tactique, mais un mode de vie pour lequel c’est l’anti-nucléarisme qui est un moyen. C’est un révolutionnaire romantique qui a raté 1848.

    Un autre exemple est Chaïm Nissim, le député écologiste genevois qui avait des relations avec les services est-allemands et qui a tiré au RPG sur le chantier de Superphénix (tiens, encore une centrale qui visait à régler un problème de l’industrie nucléaire, tout de suite on passe à l’arme de guerre et à la compromission avec des régimes dictatoriaux). Un fantasme d’Alliot-Marie incarnée, celui-là.

    Je pense que c’est là la raison profonde pour laquelle on ne peut pas s’entendre avec ces militants : lorsqu’ils écrivent sur l’article « catastrophe de Tchernobyl », ils le font comme on agite un drapeau sur une barricade, et les faits techniques sont au mieux hors sujet, au pire leur arrachent leurs sympatisants. En me mettant à leur place, je comprends leur exaspération : drapeau à la main, le slogan aux lèvres, le regard sur l’horizon rayonnant du futur anti-capitaliste, ils trébuchent sans cesse sur des petits faits mesquins et sans intérêt que des capitalo-scientistes mettent sournoisement sur leur route. La vie doit être dure pour ces gens.

    • Si l’on étend la critique « écologiste » radicale (je mets écologiste entre guillemets car il s’agit avant tout à mes yeux d’une critique sociale et politique) à d’autres secteurs que celui de la seule industrie nucléaire, ton argumentaire perd de sa force.

      • Mais précisément, je ne vois pas le SdN critiquer les usines chimiques vétustes qui menacent d’exploser ou de gazer plus de personnes que Tchernobyl n’en n’a jamais tuées. Or, le risque d’accident chimique est autrement plus élevé que celui d’un accident nucléaire.

        • Je suis bien d’accord avec toi que c’est l’ordre industriel qu’ils pourraient critiquer dans son ensemble (Réseau Sortir de l’Industrie ?). Mais justement quand tu écris :

          « Du point de vue de l’ingénieur en environnement, le point crucial est que les anti-nucléaires durs détestent le secteur électro-nucléaire indépendamment de toute considérations de risque ou de pollution : ils continueraient de le détester quand bien même le secteur serait entièrement sûr et sans déchets. »

          Tu pointes bien qu’ils formulent (sans doute maladroitement) une véritable critique politique. Qu’on ne partage pas leurs vues sur le complexe étatico-militaro-technocratique est une chose (« montrer l’industrie nucléaire comme une « force d’oppression » ») mais on ne peut nier qu’il existe de véritables enjeux collectifs en matière d’énergie et que ces enjeux ne font pas l’objet du débat public.

          • Je ne dis pas qu’il n’est pas légitime de critiquer l’existence de l’industrie ; c’est une question politique dont l’expression est et doit être libre, même si elle est stupide. La démocratie, c’est ça.

            Ce que je dis, c’est qu’enrôler des gens derrière sa barrière en avançant exclusivement des arguments sans rapport avec l’idéologie réelle que l’on défend, c’est une technique particulière. C’est courant à l’extrême-droite (la dénonciation du racisme anti-français, la défense sélective de la laïcité…) et à l’extrême-gauche (l’entrisme des groupes trotskistes, l’« anti-libéralisme » autoritaire, etc.).

            En somme, je n’ai rien contre l’ouverture d’un débat sur la politique énergétique. Qu’on en ouvre un. Ca serait justement le rôle d’un groupe comme SdN, s’il était composé de gens intelligents et courageux. Mais étant ce qu’ils sont, ils agitent des faux problèmes et font de la pseudo-contestation pour se faire de la pub, et uniquement pour ça.

            • « faux problèmes » et « pseudo-contestation » : la dangerosité des déchets nucléaires n’est pas un faux problème et même si l’on peut mettre en doute leur expertise ou la sincérité de leurs motivations, on ne peut nier que SdN mène une véritable contestation (sinon S. Lhomme ne serait pas poursuivi en justice quand bien même il serait « un révolutionnaire romantique qui a raté 1848 »).

              Je ne comprends pas vraiment ce que tu veux dire par « se faire de la pub ». Tu veux dire qu’ils ne souhaitent pas sincèrement l’arrêt et l’abandon de la filière nucléaire ?

  7. Quelques précisions

    « La production de panneaux photovoltaïques utilise des matériaux rares qui auront disparus de la surface de la planète d’ici 15 ans au train ou vont les choses  »

    Je dirais ça dépend du panneau. Le panneau de base, le plus courant avec un rendement merdique (15%, 20% au grand maximum) sont au silicium, et ça c’est tout sauf rare 🙂 Par contre c’est, comme toute industrie, polluant à produire, et ça dure 15 ans donc à renouveler.

    Derrière il y a des panneau solaires plus high tech avec des semi-conducteurs composites à gap direct dont le rendement peut grimper à 25%, et là effectivement ce sont des matériaux plus rares (indium, gallium, tellure) et parfois très polluants (cadmium, phosphore, arsenic) avec des procédés complexes et parfois extrêmement risqués (utilisation de phosphine ou d’arsine)

    Sinon même avis au global que Ludo. Le nucléaire c’est pas jojo, mais c’est pour l’instant (malheureusement) incontournable, si on ne veut pas tout produire en thermique.

    De plus les renouvelables sont des sources aléatoires et pas forcément en phase avec les périodes de pic de consommation (l’éolien marche quand ça souffle, le solaire marche le jour, avec une certaine luminosité requise – donc en hiver, avec des jours courts et une luminosité faible…) et comme on ne sait pas stocker l’électricité (en grande quantité et sans pertes élevées), il faut coupler ces méthodes de productions avec des centrales à production souple et démarrage rapide, c’est à dire du thermique.

    Donc une installation (maison) à énergie renouvelable peut bien être excédentaire en énergie sur un an, lors de forts pics de consommation (la nuit, l’hiver) elle a de fortes chances de pomper elle aussi du jus au réseau (et donc de fournir un excédent quand peu en ont besoin), produit à partir de thermique, voire du nucléaire si c’est un grand pic prévisible (genre l’hiver entre 17H et 21H)

    • Merci pour les précisions sur les process de fabrications du photovoltaïque, je m’y connais moins.

      En rédigeant ce billet j’avais en tête tous les soucis liés à la production qu’il faut faire correspondre à la consommation. Mais le billet était déjà suffisament lourd comme ça. Merci aussi pour ces explications. Juste une petite précision, avec le pompage-turbinage on parvient à stocker de l’énergie (sous forme d’eau à haute altitude), il y a cependant des pertes et les sites potentiels sont limités.

      • Oui j’avais en tête ces bacs d’eau qu’on pompe pour en « altitude » quand l’électricité coute pas cher (tard dans la nuit) et qu’on retransforme via un système hydroélectrique quand la demande se fait sentir, quand je parlais du stockage de l’électricité (ou plutôt son absence).

        Mais ça reste très marginal comparé à la consommation, est surtout le rendement est exécrable.

        • En Suisse, le pompage d’accumulation consomme 3% de la production brute du pays. Le rendement est effectivement exécrable. La démarche n’est pas vu avec une une problématique énergétique, mais avec une porblématique financière. Le prix du kWh vendu en pointe étant beaucoup plus cher que le prix du kWh acheté au milieu de la nuit.

          • Oui, c’est tout à fait ça. C’est purement financier, ça n’a rien à voir avec une quelconque innovation technique

  8. Il y a une chose à ne pas oublier c’est aussi que la plupart des « nouvelles » énergies renouvelables (comme l’éolien ou le photo-voltaïque) sont par nature incontrôlable. Par voie de conséquence, un jour nuageux et sans vent ça ne produit rien. Donc en compensation il faut tout de même maintenir une capacité de production élevée avec des centrales nucléaires/gaz/charbon/pétrole avec les coûts associés. Après si on arrivait à stocker l’énergie de manière efficace, là le problème serait différent.

    Il faut aussi voir quels sont les impacts des divers moyens de production à court et à long terme. D’un côté nous avons des centrales nucléaires qui produisent des déchets d’un volume très faible (les déchets à vie longue c’est moins d’une piscine olympique pour France). En cas d’accident, on va prendre tchernobyl parce que c’est difficile de faire pire, c’est 10000 morts tout au plus. Si on prend le charbon, sur le court terme il y a des problèmes de santé publique assez importants à cause de la pollution atmosphérique (CO₂, NOx, uranium (oui oui)) et sur le long terme le réchauffement climatique risque tout simplement de rayer toute trace de vie sur la planète en transformant la Terre en Vénus. Je suis d’avis de prendre la solution qui minimise le risque maximum. Du coup je trouve totalement irrationnel cette obsession de faire brûler du charbon/gaz/pétrole, les conséquences à long terme pouvant être dramatiques.

    Concernant l’évolution de la consommation énergétique, il faut voir que pour le moment une large partie n’est pas électrique. Si jamais on avait une généralisation des voitures électriques, la consommation d’énergie totale pourrait décliner alors que la demande en électricité pourrait exploser, il faut prendre cela en compte.

    • Au sujet de ton dernier paragraphe, j’avais écrit un billet intitulé  »Se déplacer ». Remonte un peu dans mon blog, ça peut t’intéresser.

        • Le problème c’est que je n’ai pas accès à l’article. Quand je lis la remarque liminaire selon laquelle « arguments over the death toll of Chernobyl are as politically charged as ever », cela me laisse songeur.

          • Attends, je reformule : tu n’as pas lu cet article, tu ne vas probablement pas le lire, et tu fais un commentaire insinuateur sur une phrase d’introduction frappée au coin du bon sens mais qui ne donne aucune information.

            Tu peux toujours aller lire le rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé, qui est en accès public. Il devrait être lié depuis l’article de Wikipédia, s’il reste encore des liens vers autre chose que SdN.

            • Mais j’aimerais beaucoup le lire. Si tu pouvais me le fournir, j’en serai ravi.

              C’est quoi le coup du « commentaire insinuateur » ? Relever que la question du nombre de morts liés à la catastrophe de Tchernobyl est une question hautement politique comme le fait l’article ? Parce que tu crois que la « transparence » est de mise dans le domaine industriel ? Désolé mais le nombre de contre exemples dans les domaines les plus variés est tellement écrasant que oui, je reste sceptique.

  9. Comme tu le dis, il n’existe pas une solution unique pour régler tous les problèmes d’énergie actuels. Sans doute qu’en combinant les procédés, on arrivera lentement à réduire notre consommation. Et à ce sujet, j’ai vu l’autre jour une combinaison que j’ai trouvée très astucieuse. L’énergie solaire (à ma connaissance) est utilisée soit pour produire de l’électricité avec des cellules photovoltaiques, soit pour chauffer de l’eau circulant dans des tubes noirs. La combinaison en question utilise de l’eau pour refroidir les cellules (dont la température peut monter aisément en plein soleil jusqu’à 80 degrés (Celcius). Cela permet de les conserver à une température ou leur efficacité est maximale, tout en produisant de l’eau chaude.
    L’efficacité énergétique de ces panneaux monte à environ 40%.

  10. Comme toutes les technologies, l’énergie nucléaire est une technologie de transition qui répond à un besoin à un moment donné avec des bénéfices et des défauts qui sont appréciés en tenant compte du contexte.

    Dans l’état actuel de la technologie et des besoins, l’électro-nucléaire répond bien à certaines attentes. Cette énergie est adaptée aux réseaux des pays « développés » où elle peut être substituée en base (voire semi-base) aux carburants fossiles. C’est une énergie dense qui entre peu en concurrence avec d’autres utilisations de l’espace.

    Considérée sur une base temporelle finie, l’énergie nucléaire produit des déchets très concentrés mais dont la gestion paraît poser des problèmes plus éthiques que techniques. Le gain en termes d’émission de GES est loin d’être négligeable comme aime à le dire RSdN.

    En considérant un horizon de quelques siècles, la production d’énergie primaire sera réalisée par des technologies différentes (pour faire un pronostic, je parierais sur le solaire centralisé, au moins pour les pays qui disposent d’un réseau adapté). D’ici là, l’électro-nucléaire est l’une des énergies de masse les moins coûteuses, à la fois du point de vue économique que du point de vue impact sur l’environnement et l’homme.

  11. « l’électro-nucléaire est l’une des énergies de masse les moins coûteuses, à la fois du point de vue économique que du point de vue impact sur l’environnement et l’homme. » : les populations des pays sous-développés exportateurs d’uranium ne sont pas de ton avis.

    • Je pense – et ce n’est qu’un avis personel – qu’il est très difficile de chiffrer et donc de comparer l’impact sur l’environnement des énergies de masse. Le nucléaire génère des déchets à vie très longue, mais en quantité relativement faible. L’hydro-électrique a totalement détruit des écosystèmes. Je vis à Fribourg, la faune aquatique de la Sarine sur cette portion de la rivière n’a plus de contact avec le reste de la faune aquatique de la rivière, depuis plus de 40 ans.

      Les impacts environnementaus sont différents et sont à considérer sur des bases de temps différentes. Je doute de la pertinence d’une comparaison, sans enlever de la gravité de tous ces impacts.

      • En l’occurrence je voulais surtout pointer qu’il n’y a pas que des impacts environnementaux en matière de nucléaire mais aussi des impacts géopolitiques majeurs (oppression, misère…).

        • Je suis bien d’accord. Quand il s’agit d’exploiter l’Afrique (ici le Niger) l’argent n’a pas d’odeur. Ceci dit l’exploitation de l’Afrique et la misère des populations locales est aussi vérifiable avec les sociétés pétrolières.

          • Absolument. C’est pourquoi la question de l’énergie est une question éminemment politique et sociale et non une simple question de technologie.

            • Comme toute industrie l’énergie ne doit pas oublier les questions sociales, cependant ça reste avant tout guidé par des contraintes technos.

              • Je vais l’épeler pour DC…

                Tout progrès a des conséquences sociales. C’est le but, en fait. Et certaines de ces conséquences sont négatives — il n’y a qu’à voir beugler les majors de l’industrie du divertissement (pardon de la « culture ». La Starac, c’est de la culture.) après l’introduction d’Internet.

                Le progrès, ça induit des transformations. L’introduction de l’agriculture a fait beaucoup de tort au mode de vie cueilleur-chasseur, c’est terrible, mais qu’est-ce que vous voulez ma bonne dame.

                La solution n’est jamais de nier le progrès, mais de l’implémenter de la meilleure façon possible. La solution à l’exploitation de l’Afrique n’est pas de mettre l’Afrique sous embargo.

                L’adage « on n’arrête pas le progrès » n’est pas une façon de dire « ah ma bonne dame, ils sont encore sorti un nouvel i-Phone »; ça veut dire « si vous êtes trop inadaptable pour accepter un changement et que vous essayez de vous mettre en travers de la route du progrès à la place, vous allez juste vous faire rouler dessus ».

              • Tu parles juste Ludo. La question sociale passe beaucoup trop à l’arrière-plan et c’est bien ça le problème (surtout quand les technocrates sont aux commandes).

                « La solution n’est jamais de nier le progrès, mais de l’implémenter de la meilleure façon possible. » : c’est plutôt le progrès qui implémente l’humanité. Et puis parler de « progrès » en général, en l’essentialisant, relève de l’idéologie … progressiste.

                « La solution à l’exploitation de l’Afrique n’est pas de mettre l’Afrique sous embargo. » : je ne saisis pas ce que tu veux dire par là (et d’ailleurs ce n’est pas moi qui ai soulevé la question de l’Afrique).

  12. Les questions sociales passent souvent trop en arrière plan, je te rejoins sur cet point là. Par contre, j’ai un peu de mal avec cet argumentaire brandit par certains antinucléaires.

    Il est facile de dire que le nucléaire c’est mal parce qu’on exploite les minerais du Niger tout en laissant les populations locales en pleine misère. Mais pourquoi les mêmes personnes omettent de dire que l’exploitation du charbon en Afrique-du-Sud n’a pratiquement rien à envier à l’époque de l’Aparteid, charbon utilisé en France. Ces mêmes personnes parlent-elles aussi des enfants chinois respirant des vapeurs d’arsenic dans l’industrie informatique ?

    Bref, l’argument de l’exploitation de couches sociales pauvres dans nos pays occidentaux et dans d’autres est valable dans toute l’industrie.

    • Je suis complètement d’accord avec toi. Je ne dis pas que le nucléaire c’est « mal » en soi mais simplement que l’industrie nucléaire s’inscrit comme tous les autres instruments de puissance dans une logique d’exploitation à grande échelle. Donc a contrario il n’y a aucune raison particulière de se « féliciter » du développement du nucléaire.

          • On ne peut se féliciter ni du développement du nucléaire ni du développement de l’industrie pétrolière, ayant les mêmes travers que ceux énoncés plus haut. Cependant, on vit tous dans cette société surconsomatrice. Si tous les habitants de la Terre vivaient comme nous, il faudrait 2.5 Terre pour subvenir aux besoins de tous.

            Et la responsabilité de tous ça n’est pas seulement à mettre sur le des décideurs ou des technocrates.

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